Page:Morelles - Les diamants de Kruger, 1906.djvu/29

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— Gageons que vous avez été pressé.

– Comment, pressé ?

— Bien, pressé, tassé par deux messieurs bien habillés qui vous ont amené prendre quelque chose.

— Explique-toi, Petit-homme.

— Vous ne connaissez pas ça, la presse ? Moi j’en avais entendu parler par chez nous. Moi aussi, j’ai été pressé, mais je m’y attendais.

— Tu le savais ?

— Ben oui. Il paraissait qu’il n’y aurait pas beaucoup de bluets à Saint-Moïse, cette année. Sur les entrefaites, j’entends dire qu’on demandait des hommes pour la guerre. Il est vrai que je ne suis qu’un bout d’homme, mais j’ai toujours le bout qu’il faut pour porter un fusil. Et puis, il paraît qu’on se battra pas plus là-bas qu’à Saint-Moïse. Alors, vous comprenez, je ne fais ni un ni deux, je pars pour Québec. J’arrive à Québec. J’entends dire qu’ils ont du monde plus qu’ils ne peuvent en prendre. J’étais découragé. Quelque temps après, ce n’était plus ça : Il leur fallait des Canadiens-français parmi les autres. Il paraît que c’était un ordre venu d’Angleterre, de prendre des Canadiens. J’entends dire qu’il y a des gens qui nous font boire un coup pour nous amadouer et nous engager. C’est bon ça, je ne demande pas mieux, moi, vieille terrinée. Comme, de fait, je rencontre deux messieurs qui me prennent chacun par un bras. — c’est ça, la presse. — Il y en a un qui me dit :

— Vas-tu à la guerre, cette année, Baptiste ?

Je me dis en moi-même : C’est le temps !

Tout de même, ça me coûtait. Il est vrai