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moindre parole tombée de la bouche de l’Italien, et cette étude constante de son caractère, de ses habitudes, de sa physionomie l’avaient si bien renseigné qu’il s’était risqué à lancer cette bombe. En effet, c’était jouer gros jeu ; c’était se mettre entre les mains de son ennemi, se vouer à la vengeance de ses employeurs, que José savait ou soupçonnait fortement d’être des hommes sans foi ni loi. Mais le coup réussissait, car Frascani était resté pétrifié en entendant sortir des lèvres de José ces simples mots : Prétoria, 10 mai 1897. Pourtant, José ne pouvait en déduire grand’chose et toute l’importance qu’ils pouvaient avoir, ils la tiraient des demi-révélations faites par Frascani. Ce dernier avait cherché vaguement son poignard, mais il s’était souvenu à ce moment même que l’arme était aux mains de son interlocuteur. José restait calme, il voyait sur le visage de Frascani ce qui se passait dans son âme : la rage, le désespoir et la crainte d’avoir trop parlé et d’avoir compromis l’entreprise par ses indiscrétions. Ces sentiments prirent encore plus de consistance quand José lui dit :

— Eh ! bien refusez-vous toujours mon or ? Vous comprenez que mes amis vont profiter de leur découverte ; tôt ou tard je saurai le secret, car je suis lié au docteur par des liens éternels ; il m’a sauvé la vie, je lui ai rendu le même service ; partout où il ira, je le suivrai et il ne partira jamais sans moi ; mon sort sera le sien, et, tôt ou tard, je dois savoir tout ce que lui-même sait. Mais en attendant, je ne vous le cache pis, je ne sais rien, sauf le commencement de la fameuse lettre. Et je brûle de savoir ce qu’elle contient. Dites-le moi et vous gagnez deux louis.