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Page:Moreno - Reconnaissance de la région andine, 1897.djvu/8

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fois exploitées par l’homme, ne le sont pas par ceux qui les feront le plus produire par l’effort du travail, au profit et à l’agrandissement de la nation.

Il est nécessaire que nous, argentins, réagissions, le plus tôt possible, contre notre abandon de l’exploitation du sol de la République et des richesses naturelles qu’il renferme. Qui pense à cet abandon en est peiné ; et si de temps en temps des initiatives isolées s’efforcent de produire une réaction bienfaisante, ces efforts ne sont pas protégés par la connaissance préalable du milieu où ils s’appliquent, et alors ou ils se brisent contre des obstacles qui les annulent, ou ils donnent des résultats, sinon contraires au but qu’on se propose, du moins insuffisants pour qu’ils produisent les bienfaits qu’on en attend. Il nous manque toujours une base sûre, c’est-à-dire, la complète connaissance de la géographie, de la géologie et de la météorologie, de la faune et de la flore, et nous qui travaillons à ce que cette connaissance s’acquière au plus tôt, et qui luttons contre l’indifférence publique, et les intérêts de quelques-uns auxquels l’ignorance du plus grand nombre procure des gains faciles, fût-ce aux dépens de la collectivité nationale, nous ne devons pas nous lasser dans cette tâche, puisque nous sommes convaincus que la République Argentine n’occupera pas le rang auquel elle a droit dans le concert de nations, tant que la richesse nationale ne sera pas fondée sur des bases plus solides que les actuelles.

Il est triste de dire la vérité sur ce qui se passe dans les régions que je décrirai à grands traits en racontant la reconnaissance que j’ai faite, cet été, accompagné des topographes et géologues du Musée de La Plata. La spéculation, surtout dans les territoires du sud, donne une valeur fictive aux terres, qui a en général pour base l’audace ou l’ignorance, mais elle ne donne pas un centime de revenu au trésor national ; et cette spéculation qui ne pourra pas exister avec l’exploitation de la terre par ceux qui la labourent, est entretenue par l’ignorance de cette région de la part de ceux qui ont le pouvoir de la mettre en valeur, et de la livrer à qui la puisse exploiter, connaissant d’avance les produits qu’elle peut donner.

L’indifférence nationale, en présence de la nécessité de connaître notre sol, pourrait expliquer plus d’un phénomène qui s’oppose à ce que nous soyons déjà la grande nation que nous