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Page:Moressée - Un mariage à Mondorf, 1887.djvu/213

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Fernand descendit dans le parc et alla s’asseoir sur le banc où si longtemps il était venu rêver. Il gardait toujours, pour ce petit coin sombre et discret, une préférence marquée. Tous ces arbres, tous ces buissons et jusqu’aux brins d’herbe du gazon, il les connaissait tous, les ayant éternellement étudiés naguère de son regard désolé, aux heures de souffrance et de solitude. Ils avaient surpris sans doute le secret si souvent échappé à ses lèvres, et Fernand leur était reconnaissant de leur discrétion.

En s’asseyant sur le coin du large banc, débarrassé maintenant du mal qui l’y clouait naguère jusqu’à l’heure fixe où on le venait prendre, il les regardait encore et se remémorait tout ce qu’il avait souffert. C’était là, sur cette branche du vert érable, que venait se poser si souvent l’oiseau bleu qu’il poursuivait en rêve, désespérant presque de jamais l’atteindre. C’était ce même courant du ruisselet qui lui avait chanté autrefois, dans son doux murmure, la chanson douce de l’espoir…

Le temps était aujourd’hui passé de tous ces enfantillages. Il était fort. Il était redevenu un homme, capable d’énergie et de volonté : qui donc l’empêcherait de réaliser son désir ?

Chère et douce Raymonde !… Il l’avait aimée en silence, ardemment, depuis le jour où le hasard l’avait poussé dans le compartiment qu’elle occupait avec son père, et qui devait les amener ici ensemble, sans qu’ils s’en fussent doutés. Il l’aimait pour sa touchante sollicitude pendant le voyage. Il l’aimait pour la douce pitié qu’il lui avait inspirée, pour les bonnes paroles, pleines de consolation et d’encouragement, qu’elle lui avait adressées si souvent.

Le jour enfin était venu où il allait pouvoir