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eut la chance de pouvoir s’en faire encore réserver une.

Au loin, déjà l’on entendait des bruits de voix chantant des litanies et de fanfares rythmant la cadence d’un air original, mais monotone. Marcelle s’était hâtée d’achever sa tasse de lait et de courir à la fenêtre s’asseoir à côté de Raymonde. Mais comme M. Dubreuil quittait la table pour les rejoindre, le maître d’hôtel poussa la porte sans façon, procédé bien excusable à Echternach un pareil jour, et fit entrer un inconnu qu’il présenta à son hôte :

— Celui-ci est un de mes bons amis, dit-il, et malgré la promesse que je vous avais faite de vous laisser seuls, je vous prie de l’accueillir et de lui permettre de jeter un coup d’œil par-dessus vos épaules.

— Certainement, répondit M. Dubreuil, en mesurant de l’œil l’étroitesse de la croisée et souhaitant, à part lui, l’intrus à mille lieues de là.

On se salua légèrement, l’ami de l’hôtelier ne paraissant pas choqué du tout d’ailleurs, étant assez intelligent pour comprendre qu’il gênait, et qu’on ne peut faire beaucoup d’amabilités à un gêneur. Même il se fit le moins encombrant possible, s’assit au milieu de la place et se mit à lire un journal, laissant la vue sur la rue aux étrangers, se proposant de ne regarder que plus tard, au bon moment.

La fenêtre où étaient accoudés, impatients, M. Dubreuil et ses filles, donnait sur une rue étroite, pour mieux dire une ruelle pavée, comme sont à Echternach toutes les voies de communication séparant les uns des autres les pâtés de maisons. Dans cette ruelle piétinaient d’ennui une foule