Page:Moret - L’emploi des mathématiques en économie politique.djvu/157

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D’une façon générale, dans le Manuale et dans le Manuel, l’auteur s’est efforcé d’affirmer la position objective qu’il avait prise dans le Cours : tandis que dans les déductions pratiques qu’il tirait de la théorie du Cours, il ne cachait nullement ses tendances libérales, — sans que toutefois cette théorie ait pour objet de démontrer la supériorité de telle doctrine considérée comme orthodoxe — il s’est placé dans le Manuel au point de vue de la science pure, sans laisser aucune place à l’art. Par suite, il a cherché à accroître la généralité de ses théories en les débarrassant de tout ce qui était susceptible, en apparence ou en fait, de les rapprocher de réalités nécessairement particulières et subjectives, et en ne prenant en considération que des phénomènes moyens : « Nous étudierons les actions logiques[1], répétées, en grand nombre, qu’exécutent les hommes pour se procurer les choses qui satisfont leurs goûts »[2].

C’est ainsi que dans le Manuale et ensuite dans le Manuel, au lieu de commencer par prendre séparément en considération l’échange et la production, le professeur de Lausanne étudie immédiatement l’équilibre économique en général, en le regardant comme naissant dans son ensemble du contraste des goûts des hommes et des obstacles que rencontre leur satisfaction, et que, plus tard, dans l’Encyclopédie des sciences mathématiques pures et appliquées[3], il a été encore plus loin en faisant abstraction des obstacles eux-mêmes, pour ne tenir compte que des différents genres de liaisons qui peuvent en résulter, liaisons qui constituent, à pro-

  1. Par opposition à irraisonnées, ce qui ne veut pas dire nécessairement illogiques (Voir sur ce sujet un article de M. Pareto dans la Rivista italiana di sociologia, XIV, fasc iii-iv, mai-août 1910).
  2. Manuel, ch. iii, § 1.
  3. T. I, vol. 4, fasc. 4, Paris, 1911.