Mais H. Gossen fut le premier membre de ce petit groupe de penseurs originaux, comprenant avec lui W. St. Jevons, K. Menger et L. Walras, qui, au coups de la seconde moitié du dernier siècle, ont énoncé, sous une forme ou sous un autre, le principe de l’utilité finale[1], dont la découverte fut le point de départ de l’économie mathématique.
Malgré cette importante contribution à la science, cet économiste demeura longtemps ignoré, et léserait sans doute encore aujourd’hui si W. St. Jevons et L. Walras n’avaient tenu à honneur de ne pas laisser dans l’ombre ce devancier à qui ils n’étaient nullement redevables de leurs théories. Le seul ouvrage que l’on doit à H.-H. Gossen, l’Entwickelung der Gesetze des memchlichen Verkers, und der daraus fliessenden Regeln für menschliches Handeln[2], n’eut en effet aucun succès lors de sa publication, de telle sorte que les éditeurs, Frederick Vieweg et Fils, ne tardèrent pas à en restituer tous les exemplaires restés entre leurs mains à l’auteur, qui passa ainsi inaperçu au point de n’être même pas mentionné dans l’histoire de l’économie politique en Allemagne[3] due à Roscher, « un homme
- ↑ Nous adoptons l’expression d’utilité finale (final utility), imaginée par Jevons, pour désigner l’utilité de l’élément le moins utile d’une certaine quantité d’un bien donné, parce que c’est celle qui est consacrée par l’usage en France. Mais nous nous réservons cependant de faire appel, à l’occasion des œuvres d’auteurs déterminés, aux autres désignations qui ont pu paraître préférables à ceux-ci, telles que les expressions de utilité marginale (marginal utility) et de utilité limite (Grenznutzen) ou mieux liminale, qui sont d’ailleurs plus satisfaisantes que la première, ou que le mot de rareté, qui présente par contre l’inconvénient de prêter à des confusions en donnant à penser qu’il n’est question que de la limitation en quantité, alors qu’il s’agit également de l’utilité (Voir un exemple typique de ces confusions dans les Comptes rendus des séances et travaux de l’Académie des sciences morales et politiques, numéro de janvier 1874, p. 119).
- ↑ Brunswick, 1854 ; Berlin, 1889 (réimpression).
- ↑ Geschichte der Nationalökonomie in Deutschland, Munich, 1874.