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nant le concours » des métis français du Manitoba. Pourtant il promit de rendre compte des détails de l’entrevue à Riel et aux autres chefs métis, et il retourna chez lui par une voie détournée pour éviter la rencontre des soldats canadiens qui étaient à sa recherche[1].

Mais l’alarme était donnée au Manitoba, et les autorités locales n’étaient pas demeurées inactives. Elles savaient que, indépendamment des féniens proprement dits, il y avait alors des milliers d’ouvriers, dont beaucoup étaient d’anciens soldats, travail­lant à deux lignes de chemin de fer en construction au Minne­sota. À la fin de la saison, ces individus allaient se trouver désœuvrés et partant enchantés de se jeter sur le fort Garry, qui n’avait alors que 80 hommes pour le garder « et assurer la paix de la moitié d’un continent », comme l’écrivait le gouverneur Archibald[2].

Ce monsieur admit aussi dans un document public que « l’en­vahisseur basait toute espérance de succès sur le fait que nos divisions intestines lui jetteraient entre les bras une partie de la population[3]. » Quelle belle occasion pour l’élément français de se venger des insultes des Ontariens ! N’allaient-ils pas en profiter ? Pour conjurer le danger, dont les orangistes du Manitoba n’étaient pas ceux qui se préoccupaient le moins, Archibald eut, le 4 octobre, une entrevue avec M. Ritchot, curé de Saint-Norbert. Il voulut être certain des dispositions des persécutés d’hier qui avaient maintenant les destinées du pays entre leurs mains. Fort heureusement, Mgr Taché, à la veille d’une absence dans l’est, avait rencontré Riel et obtenu de lui au moins une promesse de neutralité.

Soyez certain, avait-il dit, que ni moi ni aucun de mes amis ne nous join­drons aux féniens. Nous les détestons, car ils sont condamnés par l’Église[4].

M. Ritchot put donc assurer le gouverneur de la loyauté des métis.

  1. Ces détails, ainsi que beaucoup d’autres dans les pages qui précèdent, sont absolument inédits.
  2. Mémorandum sur l’Invasion fénienne du Manitoba, dans les témoignages devant le « Comité du N.-O. »
  3. Proclamation de l’hon. M. Archibald, 18 oct. 1871.
  4. Témoignage de M. Taché devant le « Comité du N.-O. »