sidéré de la colonie, non moins que par les autorités d’Ottawa et de Londres. Les premières traitèrent en effet avec ses représentants attitrés, qui tenaient leurs pouvoirs, aussi bien que leur mission et leurs instructions, de ce même gouvernement, et les dernières s’enquirent avec anxiété, par l’entremise de Lord Granville, du sort qui leur était fait après leur arrestation dans la capitale canadienne.
Cette question est désormais hors de toute contestation : le gouvernement présidé par Louis Riel était, le 1er mars 1870, non seulement le seul gouvernement existant à la Rivière-Rouge, mais encore il était parfaitement légal et représentait tous les groupes de la population, excepté celui des intrigants venus depuis peu de la province d’Ontario. Jusqu’au 15 juillet de la même année, époque du transfert du pays au Canada, ce gouvernement jouissait donc de tous les droits inhérents à la souveraineté coloniale, et n’avait pour supérieur que celui de Londres. C’est là un point que le lecteur doit constamment avoir présent à l’esprit s’il veut juger sainement un événement dont il me reste à parler, événement qui exaspéra les sectaires d’Ontario et même nombre d’Anglais bien pensants, et qui fut incontestablement la cause ultime de la mort de Riel.
Nous avons vu que, malgré la légitimité de la cause soutenue par les métis français, une certaine partie de la population, composée presque exclusivement de nouveaux venus, paraissait humiliée de voir des personnes de notre race et de notre foi à la tête des affaires, et avait juré de contrecarrer leurs plans par tous les moyens en leur pouvoir. Peu leur importait, apparemment, que l’autorité de Riel fît place à la discorde et à l’anarchie ; l’essentiel, à leurs yeux, semblait être de se débarrasser des « Français, » comme ils disaient. D’où les intrigues de McDougall et de ses confédérés ; d’où les complots sans cesse renaissants de Schultz et Cie. On alla même jusqu’à essayer de soulever les tribus sauvages contre l’autorité établie, tentative criminelle entre toutes et dont la réussite eût confondu tous les éléments de la société dans une perte commune. L’épouvantable massacre par les Sioux du Minnesota, dont près de cinq cents blancs tombèrent victimes sept ans auparavant, aurait pourtant dû faire