Page:Morice - Demain, 1888.djvu/18

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pétuent dans l’abstraction. Je n’ai foi qu’aux œuvres. Pourtant j’ai cru pouvoir formuler une doctrine avant de la réaliser. Me trompais-je ? Ils sont spéciaux à notre siècle, les poètes esthètes, c’est vrai ; mais n’y ont-ils pas, de par Edgar Poe, Wagner et Baudelaire, droit de cité ? Quoi ! si un poète sachant ce qu’il fait (n’est-ce pas toute la définition du poète moderne ?) l’annonce et l’expose par le comment et le pourquoi avant de l’accomplir, faut-il donc de toute nécessité que même les esprits les plus hauts et les plus fins du monde entrent en méfiance, laissent percer sous l’ambiguïté de leur jugement une vague accusation de pédantisme et se tiennent à peine de prononcer les mots sacramentels : absence d’inspiration ? N’en finira-t-on jamais avec cette antique confusion de l’inspiration et de l’inconscience ? Le public a besoin de croire que les augustes poètes que nous admirons comme lui et dont les ombres lumi-