Page:Morice - La Littérature de tout à l’heure, 1889.djvu/75

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des coiffeurs ? Pourquoi l’orgue même, qui naquit pourtant d’un mystique mariage du génie et de la sainteté, s’avilit-il à retentir de phrases de théâtre, d’airs d’opéra entre deux psaumes hurlés par les voix fausses de petits voyous mornes et vicieux, ce pendant que s’accomplit à l’autel le Mystère qui fait frémir les anges de terreur et d’amour ?

Pourquoi la littérature catholique est-elle nulle, moins que nulle, négative, un objet de dégoût pour les moins sévères ? Pourquoi, si quelque vrai talent essaie de ranimer en elle l’inspiration qui, jadis, y attirait les artistes comme dans leur cité naturelle et natale, toute la catholicité officielle le repousse-t-elle, — bruyamment, si c’est M. Barbey d’Aurevilly, silencieusement, si c’est M. Paul Verlaine ? Est-ce bien cette même Église qui, au Moyen-Âge, sauva dans son sanctuaire la littérature et tous les artset toutes les philosophies ? — On est tenté de répondre : « Non, ce n’est plus la même Église : celle-ci est le spectre funèbre de celle qui vécut dans la joie de sa gloire. Et de cette vie comme de cette mort voici la raison profonde. Les Révélations, ayant pour interprète le génie humain, ne durent qu’autant qu’elles lui font l’atmosphère qui lui est essentielle pour vivre et pour se développer. Or le génie, l’ombre de Dieu, est comme lui de créer. Sa création, à l’intérieur d’une Révélation, se limite nécessairement à la constitution logique, à la fixation de la doctrine. Le génie chrétien a donc pu vivre — et