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LES MYSTÈRES DU CRIME

— Le malheureux, comme je le pensais, accepte mes consolations et mourra dans la pénitence… Dieu soit loué.

Le prêtre de la Roquette, vieillard imbécile tombé en état d’enfance, n’eut aucun soupçon.

— Je vous laisse, dit-il en souriant au bandit.

— Bougre d’âne ! s’écria Général des Carrières, quand il se vit seul avec l’envoyé de la Sauvage.

Le faux missionnaire se rapprocha vivement.

Il était vêtu en ecclésiastique et toute sa personne semblait se prêter à ce déguisement, car ce devait en être un, étant donné ses paroles.

— Qui êtes-vous ? demanda le condamné.

— Je suis le nouveau chef de la bande, répondit-il. N’aies pas de crainte. Je viens te donner le dernier baiser de la Sauvage…

Il embrassa Général qui lui serra les mains avec effusion.

— C’est une brave fille, dit-il avec une indicible émotion, et ça me fait du bien de songer qu’elle ne m’oublie pas. Dis-lui de penser à moi et de me venger !

— Comment cela ?

— Écoute. Avant d’être l’amant de la Sauvage, j’avais pour maîtresse une garce du nom de Titille. Je l’ai lâchée. Depuis elle est devenue, devine quoi ? la femme, la paillasse de M. Dublair !

— Le bourreau ?

— Juste. Mais il ne l’était pas à cette époque-là. C’est un ancien élève en médecine qui s’est fait mouchard. C’est alors qu’il est devenu l’amant de Titille. Elle lui a donné tous les renseignements possibles sur moi et, grâce à cette trahison, j’ai été pincé.

— Est-ce certain ?

— Absolument. À l’instruction, tout s’est découvert. Elle m’a chargé à l’audience. J’ai su toute l’affaire par un compagnon de cellule qui connaissait Titille.

— Et puis ?

— Dame ! après ce beau fait, M. Dublair, poussé par le chef de la sûreté, a été nommé à la place de l’ancien exécuteur qui venait de mourir.

— Il a gardé cette Titille avec lui ?

— Oui, quelque temps, mais c’est la dernière des salopes ; il lui faudrait dix hommes par jour à cette pourriture ! Il a fini par se séparer d’avec elle. Il paraît qu’elle habite la place Maubert.

— Je la trouverai et la Sauvage sera son juge ; je crois qu’elle ne trouvera pas grâce.

— Bravo !

— Quant à Dublair…