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LE DOCTEUR NOIR

thique pour la grande victime dont je sollicite l’honneur d’un serrement de mains.

Le directeur donna une chaleureuse étreinte à Jean-Baptiste Flack.

— Il me reste à vous dire, continua celui-ci, que, toute modestie à part, je suis orgueilleux de la façon indulgente dont vous avez accepté le témoignage de mon dévouement subalterne.

— Vous êtes brigadier de la police politique, sans doute ? fit M. Cuplat.

— En effet, j’ai été nouvellement promu à ce grade.

— Vous n’avez aucune humilité à conserver vis-à-vis de moi. Votre poste est enviable…

— Oh ! interrompit avec fougue Jean-Baptiste Flack, supposez-vous qu’un chef de policiers ignore la distance qui le sépare du directeur de la prison politique ?…

— Dites de l’ex-directeur, gémit l’infortuné Cuplat.

— Hélas ! monsieur…

— Ne me plaignez pas, fit M. Cuplat, je suis un stoïcien. Je me suis trompé d’époque, voilà tout. Je devais naître à Rome au siècle des Brutus ; malheureusement, j’ai vu le jour à une époque où la presse insulte Dieu lui-même.

— C’est vrai… elle vous a attaqué !

M. Cuplat et Jean-Baptiste Flack étaient arrivés devant la prison.

En face se trouvait un restaurant de mauvaise apparence.

Le directeur le désigna à son compagnon.

— C’est là, dit-il, c’est là !…

Fiack ne comprit pas tout d’abord.

Il suivit néanmoins M. Cuplat qui entra dans la boutique en s’écriant :

— Je vous présente le gargotier dont je suis l’associé, comme disent les journaux !

Le patron de la maison conservait un air rébarbatif.

Il n’ignorait pas que le directeur était promu à un nouveau poste.

— Que prenez-vous ? demanda M. Cuplat à Jean-Baptiste Flack.

— Mon Dieu, ce que vous voudrez… un vermouth.

— Ami, fit le directeur en étendant le bras vers le gargotier, donne-moi un calice d’amertume que je le boive jusqu’à la lie.

— C’est-il une absinthe pure que vous voulez dire ?

— Oui, pure comme ma conscience.

Le restaurateur servit ses deux clients, sans dire un seul mot.

Ils trinquèrent avec effusion.

— Frère, tu ne prends rien, fit M. Cuplat au patron.