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LE DOCTEUR-NOIR

Il reposa son verre sur le comptoir.

— Oh ! ciel ! que vient-il de dire ?

Le patron réitéra sa phrase :

— Je dis que c’est huit sous que vous me devez. Ah ! j’en ai assez de votre clientèle. Je veux bien servir les prisonniers politiques, mais c’est payer trop cher leur pratique que d’entretenir leur directeur… ou plutôt leur ex-directeur.

Le restaurateur appuya avec intention sur le dernier mot.

M. Cuplat devint rouge à faire craindre une attaque d’apoplexie.

— Et toi aussi, mon fils !… toi aussi ! gémit-il.

Et il sortit comme un fou de la boutique en répétant douloureusement :

— Ils triomphent ! les reptiles de la presse. Ils triomphent !

Un instant, il se tint debout sur le seuil de la prison, regardant d’un air tragique de l’autre côté de la rue.

Le gargotier était sorti, en lui criant.

— Et mes consommations ?

— Sois maudit ! répondit M. Cuplat en rentrant dans l’intérieur de la prison.

Jean-Baptiste Fiack était resté dans la boutique.

Il paya les quarante centimes et il sortit à son tour.

— Voilà un directeur qui fera merveille à Mazas, conclut-il ; je vais faire plus ample connaissance avec lui. Cette fois je ne reviendrai pas à Noisy sans apporter une lueur d’espérance. Traversons la rue… et pour cause.


CHAPITRE II

L’abbé Ventron.

Flack souleva le lourd marteau de fer de la prison.

Un guichet s’ouvrit dans la porte et la tête d’un surveillant apparut.

— Que voulez-vous ?

— J’étais avec M. le directeur, il n’y a qu’un instant. Je désire lui dire encore un mot.

Le guichet se referma.

Le domestique du Docteur-Noir entendit un bruit de pas qui s’éloignait.