Page:Moselly - Terres lorraines, 1907.djvu/203

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bons, des devises, et des chapeaux de papier fin aux formes bizarres ; mitres d’évêques, bicornes de gendarmes et casques de pompiers. Les demoiselles de la compagnie les piquaient sur leurs coiffures, et cela leur donnait un petit air canaille.

Pierre était fêté et admiré, comme toujours.

Soudain on entendit des voix, de petites voix fluettes qui chantaient au loin, derrière les murs fermant l’enclos de vignes. C’était une très vieille chanson lorraine, qu’on chante aux portes des épousées : « Broute, broute, la mariée est sourde. » Les petits enfants sortant de l’école, selon le rite séculaire, venaient demander leur part des victuailles. Des cuisinières allèrent leur ouvrir la porte de l’enclos, et ils entrèrent tous, grands et petits, riches et pauvres. On leur distribua des croûtes de pâté, des morceaux de brioche, des cuisses de volaille sur des chanteaux de pain. Les enfants des riches mangeaient pour s’amuser, mais il y avait là de pauvres petits, fils des carrieurs, mariniers, qui habitent des cahutes au bord de la rivière. Ceux-là n’étaient pas souvent à pareille aubaine : ils dévoraient avec des mines affamées, des yeux qui en disaient long. C’était naïf et charmant, cette joie de la ripaille qui se prodiguait, qui se répandait, qui gagnait le village, dans la personne des tout petits.

Les fiancés restaient très tard à causer, assis sur le banc de pierre, devant la maison de Marthe.

Derrière eux la maison s’endormait. On entendait le