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garde aller et venir dans la grande cuisine, faisant ses préparatifs pour la tournée du lendemain. De temps à autre, la vieille Catherine venait sur la porte pour voir le temps qu’il faisait. Une habitude des gens de la campagne, qui vivent dans l’angoisse des intempéries, dans ces pays où le climat est si rude aux récoltes.

Sur leurs têtes le feuillage de la treille, doucement remué par des souffles, mettait une palpitation au fond de la nuit.

C’étaient des nuits de juin, nuits sans lune où le ciel était plein d’un fourmillement d’étoiles. De longs reflets d’argent traînaient sur les vitres, entre les barreaux de fer. Sur les toits de tuile affaissés, pliant leurs faîtes comme l’échine d’une bête lasse, la Voie lactée, le chemin de Saint-Jacques, comme on dit là-bas, faisait ruisseler, à travers le firmament, sa poussière vivante et nacrée.

Et d’autres fois la pleine lune, énorme et toute ronde, se levait à l’horizon des coteaux de vignes, éborgnant sa grosse face aux échalas blancs. Et tandis qu’elle argentait le haut des façades et la cime des toits, la rue, la place, les ruelles des jardins, bordées d’osiers secs, restaient plongés dans une ombre ardente, où passait l’odeur des vignes en fleur.

Toutes les lumières s’éteignaient dans le village. On se couchait de bonne heure, car il fallait se lever matin, le travail pressant. On voyait de grandes ombres passer sur les murs, quand les paysans transportaient les lampes d’une pièce dans une autre.

Seule une faible lueur restait allumée très tard à l’entrée de la Creuse, derrière les petites vitres sans