Page:Moselly - Terres lorraines, 1907.djvu/236

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folles, projetaient des ombres mouvantes sur les murs.

Ils hésitaient, pénétrés d’une vague émotion au seuil de la nuit, craignant d’en surprendre le secret, de réveiller les puissances mystérieuses qui affolent le cœur des hommes, et rôdent comme des bêtes, sous la paix des grands arbres, près des gazons effleurés par la lune.

Plus résolue, elle le prit par la main et l’entraîna. Ils allèrent s’asseoir au pied d’un mur de pierres sèches au bord de l’eau, et ils se mirent à causer à voix basse.

Ils parlaient de choses indifférentes : de ce bal qu’ils comparaient à d’autres qu’ils avaient vus, des fêtes prochaines, des façons de danser propres à chaque pays. Il y avait des moments où ils se taisaient, pour mieux entendre le chuchotement des choses inavouées, qui murmuraient dans leurs cœurs. Et parfois, ils étaient distraits et se répondaient tout de travers, comprenant bien que ce qu’ils ne disaient pas, valait mieux que leurs paroles.

Pourtant, elle eut un vif mouvement de joie, en apprenant que Pierre devait encore rester tout un grand mois dans le pays. Elle lui dit aussitôt, comme pour le remercier : « Nous aussi, nous ne sommes pas près de partir. » Et ces paroles, à tous deux, leur furent douces.

Il lui demanda son nom. Elle s’appelait Thérèse : le nom lui plut.

Autour d’eux, la prairie exhalait l’odeur pénétrante des herbes mouillées de rosée. L’eau passait à leurs pieds, tantôt brillante et tantôt noire. De larges nappes d’argent se tordaient dans les remous ; des courses de