Page:Moselly - Terres lorraines, 1907.djvu/285

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Soudain, une étoile glissa de la voûte nocturne, laissant derrière elle une traînée de feu, puis elle éclata comme une fusée, illuminant au loin les profondeurs du ciel. Elle pensa, avec une tristesse résignée, qu’il était inutile désormais de faire aucun souhait de bonheur.

Dénouant son tablier, elle le plia soigneusement et le posa à côté d’elle, puis elle plaça par-dessus la fine coiffe de toile blanche qu’elle avait portée tout le jour ; un dernier mouvement de peur fit qu’elle releva ses jupes par-dessus sa tête, et elle se laissa glisser dans l’eau noire.

Une lente ondulation parcourut les eaux, les roseaux des bords tremblèrent, puis tout rentra dans le repos. Et il n’y eut plus à la surface que le reflet tremblant d’une étoile, pareil à une larme d’argent.

On la retrouva, le lendemain, après de longues recherches.

Il avait fallu prendre, pour la retirer, le grand épervier à larges mailles, le « gille », — c’est le terme qu’on emploie là-bas, — dont les pêcheurs se servent pour barrer des bras entiers de la rivière.

Quand on l’eut déposée sur la berge, parmi les joncs et les menthes fraîches, quand on vit son fin visage, souillé de fange noire et gluante, ses cheveux ruisselants, dont les torsades dénouées s’enchevêtraient d’herbes fluviales, visqueuses, sa jeunesse apparut si touchante que des gens pleuraient autour d’elle : des