de lui, il déclarait qu’on serait mieux couché cette nuit-là dans un lit de plume, que sous un chêne du Bois-sous-Roche.
On annonçait des mariages pour cet hiver.
On se tâtait, les paroles se faisant précautionneuses et les visages s’inspectant à la dérobée. Les vieilles gens n’étaient pas sans concevoir quelque soupçon sur l’inclination de leur fille.
Ils lui citaient des noms, des suppositions qu’on faisait pour rien, pour le plaisir, histoire de raconter quelque chose. Quand l’interrogatoire devenait trop pressant, Marthe l’esquivait d’un sourire, ou bien tournait en ridicule le parti qu’on lui proposait : l’un était tout bancal, l’autre avait le nez de travers.
Malgré les rires, on sentait bien que la conversation était sérieuse.
La mère Catherine, d’ordinaire, au cours de ces propos, prenait une physionomie animée, contre son habitude. Posant son ouvrage sur ses genoux et relevant ses lunettes sur son front, elle dévisageait attentivement sa fille, la couvant d’un regard clair et passionné. Puis elle se mettait à vanter sa gentillesse, son économie, ses talents de bonne ménagère. Et la scène finissait par des embrassades.
Parfois aussi les deux vieux faisaient allusion à l’argent mis de côté, à l’aisance de la famille. Un beau parti ne se ferait pas attendre. Et cette certitude était la récompense d’un effort âpre, prolongé pendant toute une vie.
Ce jour-là on parla de Pierre Noel.
Marthe s’était levée, et s’approchant de la fenêtre, elle affectait de regarder au dehors ; pour dissimuler sa gêne.