Page:Mouhot - Voyage dans les royaumes de Siam, de Cambodge, de Laos et autres parties centrales de l'Indo-Chine, éd. Lanoye, 1868.djvu/142

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était déjà trop tard pour moi de saisir mon fusil, l’animal en quelques secondes fut hors de portée. Grâce à la proximité de la mer et au voisinage des montagnes, le moment des fortes chaleurs a passé inaperçu ; aussi je fus fort surpris en recevant, il y a quelques jours, une lettre de Bangkok, dans laquelle on me dit que depuis plus de trente ans on n’avait pas eu de pareilles chaleurs. Beaucoup d’Européens qui habitent cette ville sont malades ; cependant je ne crois pas le climat de Bangkok plus malsain que celui des autres villes de l’Asie orientale situées sous le tropique ; je serais même porté à croire le contraire ; mais l’exercice qui est nécessaire à l’entretien de la santé y est pour ainsi dire impossible, et il n’y a aucun doute que ce manque d’action contribue beaucoup aux maladies.

Depuis longtemps je m’étais proposé de pénétrer dans une grotte qui se trouve sur le mont Sabab, à mi-chemin entre Chantaboun et Kombau, et si profonde, qu’elle s’étend, dit-on, jusqu’au sommet de la montagne. Je partis donc accompagné de Phraï et de Niou, munis de tout ce qu’il nous fallait pour notre excursion. Arrivés à l’entrée de la grotte, nous allumâmes nos torches, et, après avoir escaladé les blocs de granit qui sont près de l’entrée, nous y descendîmes. Des milliers de chauves-souris, réveillées par la lueur de nos flambeaux, se mirent à voltiger en rond autour de nous, éteignant nos torches à chaque instant et nous fouettant le visage de leurs ailes. Phraï marchait le premier, sondant le terrain de la lance dont il était armé. Nous avions fait ainsi une centaine de pas à peine lorsque tout à coup il se