Page:Mouhot - Voyage dans les royaumes de Siam, de Cambodge, de Laos et autres parties centrales de l'Indo-Chine, éd. Lanoye, 1868.djvu/164

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une vaste salle en bambou, revêtue de chaume et qui avait été récemment construite pour loger le roi et sa suite. La nuit, j’eus des gardes à ma porte, envoyées par les autorités afin de me garer de tous risques et évictions, et, grâce à la lettre du roi, que je présentai, je fus respectueusement traité. Le lendemain, je parvins à louer un éléphant pour me conduire à la prochaine station, ce qui me coûta un franc de notre monnaie.

Le jour suivant, je dus continuer ma route pieds nus. Ce que nous eûmes à souffrir de la chaleur dépasse tout ce que je m’étais imaginé jusque-là de l’effet du soleil dans la zone torride. Cet astre était alors au zénith, et ses rayons brûlants, répercutés par le terrain sablonneux, devenaient intolérables à dix heures du matin ; c’était à ce point que les indigènes, qui ont la plante des pieds fort dure, ne pouvaient supporter le contact du sol et cherchaient les touffes d’herbe pour y poser le pied ; les bœufs ne marchaient qu’en piétinant continuellement et donnaient tous les signes de la douleur et de l’épuisement ; malgré l’aiguillon et le rotin, ils refusaient souvent d’avancer. L’eau des mares était non pas tiède, mais chaude ; l’atmosphère semblait embrasée, tous les êtres sans force, et la nature languissante et accablée. Au milieu du jour, nous faisions halte, pour nous remettre en route à trois heures. Sur tout notre parcours il n’y avait pas une goutte d’eau potable, même pour nos animaux qui souffraient de la soif plus encore que nous-mêmes ; et, Pour cuire notre riz et faire notre thé, nous n’avions d’autre ressource que celle des mares et des bour-