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Page:Mouillard - L’empire de l’air.djvu/134

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GUÊPIER.

horizon à l’autre, et en longitude du canal de Suez au Bahr-Youssef.

En entrant dans ce désert marécageux par Belqas, on voit, à une heure de marche en descendant au Nord, les cultures cesser subitement. — La terre, sans être cependant improductive, ne possède comme végétation que des roseaux, quelques tamaris et la bruyère des terres salées.

C’est là qu’est le paradis des chasseurs au marais ! — Les canards et les sarcelles s’y voient par millions, le scolopax cocorli anime ces solitudes de ses cris aigus auxquels répondent les sternes et les mouettes, qui arpentent cette plaine immense à grands coups d’ailes réguliers. Les deux martins-pêcheurs, le vert et le noir et blanc (coryle rudis), se rencontrent à chaque pas. — L’aigle africain plane sur toutes ces flaques d’eau, plonge de temps en temps dans les roseaux, d’où il s’enlève ensuite lourdement, pour transporter avec peine sa proie sur quelque côm qui fait île, et dont il fait sa résidence. — Parfois enfin, on voit se dessiner sur le ciel d’un bleu cru la gigantesque silhouette de l’oricou, qui du haut des nues étudie cette contrée noyée, pour y découvrir quelque cadavre de buffle apporté par les canaux.

Il y a de tout dans ces solitudes, depuis la caille jusqu’à l’outarde houbara, depuis le pélican jusqu’au petit plongeon (colimbus minor), depuis la loutre jusqu’au sanglier. On voit même, de temps en temps, des sentiers tracés dans la boue par les pas des hyènes et des loups blancs.

L’homme y est rare ; on ne rencontre pas le moindre hameau. Par hasard, on apercevra au loin un arabe se profiler à l’horizon : c’est un pêcheur de