Page:Mourguet - Théatre lyonnais de Guignol, tome 2.djvu/11

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Mme BOBINARD, à part.

Quelle ingratitude ! J’ai le cœur déchiré.

GUIGNOL.

Qu’avez-vous donc, Madame ? Vous me paraissez joliment triste !

Mme BOBINARD.

Ce que j’ai, c’est que, malgré mon dévouement, mon mari ne m’a absolument rien laissé… Si j’avais été riche, je t’aurais bien gardé… J’ai regret de renvoyer un serviteur tel que toi.

GUIGNOL.

Oh ! oui, c’est un ingrat, votre mari… Vous qui avez eu si soin de lui !… Tout le monde, dans le quartier, croit qu’il vous a laissé son bien… Quel homme pénible !… M’en a-t-il fait endurer, dans le temps, quand y fallait l’accompagner le long des Étroits & lui prendre des iragnes[1] pour chiper des goujons… moi qui les crains comme la peste !… Et, depuis qu’il était malade, il était toujours à me dire : Guignol, goûte-moi donc ce bullion ;… Guignol, goûte-moi donc cette tisane ;… Guignol, goûte-moi donc ces pilules… Une fois il m’en a fait prendre une qui m’a fait courir pendant quinze jours… Et puis, la nuit, il avait toujours peur que je m’endorme… Il avait mis une épingle au bout de sa canne,

  1. Iragne, araignée.