Page:Mourguet - Théatre lyonnais de Guignol, tome 2.djvu/217

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croûte, quoique je l’aime pas… C’est un pays qui me convient pas, l’Allemagne… Croiriez-vous que j’ai jamais pu leur z’y apprendre à parler français ?.. C’est là que nous avons fini… Un jour que nous étions aux eaux dans un endroit que le nom est en bad… Krackenbad… Roulenbad, je me souviens plus… mon maître me dit : Habille-moi & suis-moi à la maison de jeu ; je veux une dernière fois tenter la fortune. — Maître, vous allez perdre encore. — Obéis, & ne raisonne pas… Bon ! je l’habille, je le suis… Nous allons dans une maison superbe ; de l’or, des tapis, des lustres partout. Mon maître me laisse dans une antichambre en me disant : Attends-moi… Je l’attends ; je regardais de temps en temps par la porte & j’entendais rouler les espinchaux[1] sur la table… Tout d’un coup, un tapage de diable… on criait, on se battait… Mon maître arrive tout effaré : — Guignol, j’ai tout perdu ; suis-moi, partons… Mais la garde était venue ; les portes étaient fermées ; on voulait arrêter tout le monde. Mon maître saute par une fenêtre, en me disant : Suis-moi… Comme c’était agriable, moi qui connais pas le gymnase !… Enfin, je me mets en peloton, je me lance, j’arrive en bas, patatras, dans un gaillot[2]… J’attrape un poisson dans mes souliers… je me relève tout trempe… & vite à l’hôtel… Nous faisons nos malles tout en cuchon[3] ; mon maître me dit : Suis-moi… & nous partons… Mais plus de barline… nous prenions la diligence, & puis quéques jours après les coucous… que

  1. Les espinchaux : l’argent.
  2. Gaillot : bourbier.
  3. Cuchon : tas, amas.