Page:Mourguet - Théatre lyonnais de Guignol, tome 2.djvu/218

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ça vous sigrolle[1], ça vous sigrolle… Et puis la voiture Talon, Jarret & Cie… Vlà pus de douze jours que nous marchons… Y nous restait encore quéques sous… Dans une auberge, mon maître a trouvé un gone de mauvaise cale qui lui a proposé une partie d’écarté… C’est not’pauv’argent qu’a vîte été mise à l’écart… Du depuis ce temps là, toujours sur nos jambes & rien dans le ventre… Et puis c’est moi qui fait la lissive… Quand en route nous trouvons un ruissiau… je me mets à genoux sur le bord… je gassouille[2] une chemise dans l’eau… un caillou en guise de savon : zig, zig, pan, pan, pan… v’là ma chemise lavée… Je la repasse avec un autre caillou qu’a chauffé au soleil… v’là notre lusque… Mais c’est le manger qui me gêne le plus… Et M. Alfred qui revient pas… Je vais me coucher, tant pis ; je meurs d’énanition… Si y pouvait me tomber deux aunes de boudin dans le bec. (Il s’endort la tête appuyée sur son sac ; on l’entend murmurer : ) Un bon sississon !.. une salade de dents de lion !…


Scène V.

LÉONCE, ALFRED, GUIGNOL, endormi.

Pendant cette scène, Antoine se montre à deux ou trois reprises & paraît écouter.

ALFRED.

Oui, mon cher cousin, je suis ruiné & n’ai plus d’espoir qu’en toi. Il faut que tu me réconcilies avec ton

  1. Sigroler : secouer.
  2. Gassouiller : agiter dans l’eau.