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pêcher.

— Soyons, qu’est-ce que tu ferais si tu étais à ma place ?

— J’aurais peut-être le tort d’accepter.

— Alors j’accepte.

— Tu fais bien, puisque tu t’en sens le courage et la force.

Édouard dit donc oui, aux délégués, qui partirent pleins de satisfaction.

La carrière s’ouvrait devant lui ; il y entrait.

Dès le lendemain, homme d’action, il commençait ses préparatifs pour descendre dans son comté faire la campagne électorale.

Il n’était que temps ; il n’y avait plus que quinze jours pour la nomination, soit trois semaines jusqu’à la votation, qui aurait lieu le vingt-six.



CHAPITRE XXVIII.

À l’assaut


Lorsque Édouard, avec en tête les idées sérieuses et les mille stratagèmes de guerre électorale que l’on peut concevoir, arriva à Saint-Germain, ce fut, comme la fois précédente, Giroux qui le reçut.

Mais pas seul : tous les notables de l’endroit s’étaient portés à sa rencontre.

Un truck à bagage servit d’estrade et il dut faire un discours.

Il n’eut pas de peine à exprimer une émotion qu’il ressentait réellement.

Il dit sa surprise et sa reconnaissance, et sa volonté de faire tout en son pouvoir pour mériter un pareil accueil.

Alors Giroux, qui était décidément un organisateur sans pareil, qualité pour laquelle l’honorable Potvin le prisait fort, naguère, donna un signal ; et c’est au son d’une fanfare et au milieu des vivats qu’Édouard fut reconduit chez lui.

Sa mère et sa sœur embrassèrent le triomphateur et lui firent une réception encore plus chaude que ses partisans politiques.

Et quand Édouard s’endormit, il avait commencé la bataille et était sacré homme politique.

Dès le lendemain matin, Giroux vint le prendre. — Il ne s’agissait pas de lambiner, comme il disait.

Il le présenta à une vingtaine de braves villageois, qu’Édouard, élevé à Saint-Germain, ne connaissait cependant pas tous.

Voilà tes cabaleurs, lui dit-il.

Puis il le conduisit à une salle où une demi douzaine d’hommes travaillaient méthodiquement, qui fi compulser des listes, qui à envoyer des circulaires.

Voici ton comité, lui dit-il encore.

Enfin il lui présenta quatre autres personnes, comme ses orateurs.

— Veux-tu me dire qu’est-ce qui me reste à faire ? ne put s’empêcher de demander Leblanc.

— À gagner.

— Ça m’a l’air tout fait d’avance.

— C’est pourtant tout ce que je n’ai pas pu faire.

— Tu aurais aussi bien fait de ne pas me demander et de me télégraphier, le vingt-six au soir : tu es élu.

— Tu exagères la valeur de mon organisation, mon cher : tu vas voir que je t’ai réservé de l’ouvrage et qu’il y en a encore énormément.

Effectivement, ils se mirent tout de suite à l’ouvrage et Édouard put s’apercevoir de la vérité des paroles de Giroux. Celui-ci était un terrible travailleur et il menait la lutte à une allure endiablée.

Sachant que ce sont les unités qui font les dizaines et les dizaines qui font les centaines, Giroux et Édouard faisaient du cas de chaque vote et les disputaient tous avec acharnement.