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Page:Mullié - Biographie des célébrités militaires des armées de terre et de mer de 1789 à 1850, I.djvu/120

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plus longtemps à la prise de Saint-Jean-d’Acre. Il en leva le siège, et pour consoler ses soldats, il leur adressa cette proclamation : « Après avoir, avec une poignée d’hommes, nourri la guerre pendant trois mois dans le cœur de la Syrie, pris 40 pièces de campagne, 50 drapeaux, fait 10.000 prisonniers, rasé les fortifications de Gaza, Kaïffa, Jaffa, Acre, nous allons rentrer en Égypte. »

La situation de l’armée est des plus critiques : outre l’ennemi qui pouvait inquiéter ses derrières pendant sa retraite, les fatigues et les privations qui l’attendaient dans le désert, elle avait à sa charge un grand nombre de pestiférés : les laisser en arrière, c’était les livrer à la fureur des Turcs, qui ne manqueraient pas de les égorger en représailles des massacres de Jaffa ; les recevoir et les emmener au milieu de ses rangs, c’eût été favoriser les progrès du fléau de gaîté de cœur.

Il y avait deux dépôts de malades : l’un dans le grand hôpital du mont Carmel, et l’autre à Jaffa. Par ordre du général en chef, tous ceux du mont Carmel furent évacués sur cette dernière ville et sur Tentura. Les chevaux d’artillerie dont les pièces furent abandonnées devant Acre, tous ceux des officiers, tous ceux du général eh chef furent livrés à l’ordonnateur Daure, pour leur servir de transport ; Bonaparte est à pied et donne l’exemple.

L’armée, pour dérober son départ aux assiégés, se mit en larche pendant la nuit. Arrivé à Jaffa, le général ordonne trois évacuations de pestiférés vers trois points différents : l’une par mer, sur Damiette, la seconde et la troisième par terre sur Gaza et sur El-Arisk.

Dans sa retraite, l’armée fait un désert de tous les pays où elle passe : bestiaux, moissons, maisons, tout est détruit par le fer et le feu ; la ville de Gaza, restée fidèle, est seule épargnée.

Enfin, après quatre mois d’absence, l’expédition arrive au Caire avec 1.800 blessés ; elle a perdu en Syrie 600 hommes morts de la peste et 1.200 qui ont péri dans les combats.

L’échec éprouvé devant Saint-Jean-d’Acre avait eu du retentissement en Égypte ; les émissaires turcs et anglais faisaient courir le bruit que l’armée expéditionnaire était en grande partie détruite, que son chef était mort. Bonaparte, en habile politique, détruisit facilement les impressions que ces menées avaient produites sur les esprits, et fit sentir aux Égyptiens combien étaient chimériques les espérances qu’ils avaient fondées sur ses revers. Par ses ordres, les troupes, en entrant en Égypte, prirent l’attitude d’une armée triomphante : les soldats portaient dans leurs mains des branches de palmier, emblèmes de la victoire. Dans sa proclamation aux habitants du Caire, il leur dit : « Il est arrivé au Caire, le Bien-Gardé, le chef de l’armée française, le général Bonaparte, qui aime la religion de Mahomet ; il est arrivé bien portant et bien sain, remerciant Dieu des faveurs dont il le comble. Il est entré au Caire par la porte de la Victoire. Ce jour est un grand jour ; on n’en a jamais vu de pareil ; tous les habitants du Caire sont sortis à sa rencontre. Ils ont vu et reconnu que c’était bien le même général en chef Bonaparte en propre personne ; ils se sont convaincus que tout ce qui avait été dit sur son compte était faux… Il fut à Gaza et à Jaffa ; il a protégé les habitants de Gaza ; mais ceux de Jaffa, égarés, n’ayant pas voulu se rendre, il les livra tous, dans sa colère, au pillage et à la mort. Il a détruit tous les remparts et fait périr tout ce qui s’y trouvait. Il y avait à Jaffa environ 5.000 hommes des