Page:Mullié - Biographie des célébrités militaires des armées de terre et de mer de 1789 à 1850, I.djvu/156

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prétentions de l’ennemi. Si je voulais vous croire, je donnerais à l’ennemi plus qu’il ne demande. Si l’on me demandait la Champagne, il faudrait donc encore céder la Brie ? Est-ce en présence de l’ennemi qu’on doit faire des remontrances ? Le but était de m’humilier. On peut me tuer mais on ne me déshonorera point. Je ne suis pas né parmi les rois, je ne tiens pas au trône. Qu’est-ce qu’un trône ? quatre morceaux de bois dorés couverts de velours. — Dans quatre mois, je publierai l’affreux rapport de votre commission. Que prétendiez-vous faire ? Nous reporter à la Constitution de 91 ? Qui êtes-vous pour réformer l’État ? Vous êtes les députés des départements ; moi seul je suis le représentant du peuple. Et qui de vous pourrait se charger d’un pareil fardeau ? Je ne suis à la tête de cette nation que parce que sa Constitution me convient. Si la France en voulait une autre et qu’elle ne me convînt pas, je dirais à la France de choisir un autre souverain. C’est contre moi que les ennemis s’acharnent encore plus que contre les Français. Mais pour cela faut-il qu’il me soit permis de démembrer l’État ? Est-ce que je ne sacrifie pas mon orgueil, ma fierté, pour obtenir la paix ? Oui, je suis fier, parce que je suis courageux ; je suis fier, parce que j’ai fait de grandes choses pour la France. Si j’éprouve encore des revers, j’attendrai les ennemis dans les plaines de la Champagne. Dans trois mois nous aurons la paix ou je serai mort. Retournez dans vos foyers. En supposant même que j’eusse des torts, vous ne deviez pas me faire des reproches publics. Je vous avais indiqué un comité secret. C’est en famille qu’il faut laver son linge sale. M. Renouard dit que le maréchal Masséna a pillé la maison d’un citoyen. M. Renouard a menti. La nature m’a doué d’un caractère fort ; il peut résister à tout. Je suis au-dessus de vos misérables déclamations. Mes victoires écraseront vos criailleries. Nous avons des ressources plus que vous ne pensez. Les ennemis ne nous ont jamais vaincus, ne nous vaincront point, et ils seront chassés plus promptement qu’ils ne sont venus. Au reste, la France a plus besoin de moi que je n’ai besoin de la France. »

Cependant les Autrichiens, au nombre de 120.000 hommes, avaient pénétré en France par la Suisse, dont ils avaient violé ou acheté la neutralité ; les Russes et les Prussiens avaient passé le Rhin ; une armée formidable, commandée par Bernadotte et composée de Suédois, Russes, Prussiens, Anglais, tous ennemis de la France, est destinée à envahir l’Empire par la Belgique. Au 25 janvier, le fort Louis, Montbéliard, Haguenau, le fort l’Écluse, Saint-Claude, Trêves, Vesoul, Épinal, Bourg-en-Bresse, Cologne, Nancy, Dijon, Toul, Châlons-sur-Saône, Bar-sur-Aube sont au pouvoir des coalisés.

Le 6 janvier 1814, une convention provisoire a été conclue entre Murat, roi de Naples et l’Angleterre : elle établit un armistice dont l’expiration sera ratifiée trois mois à l’avance. Le 11, Murat conclut un traité d’alliance avec l’Autriche, par lequel il s’engage à fournir 30.000 hommes à la coalition, moyennant quoi ses États en Italie lui sont garantis ainsi qu’à ses héritiers.

La défection de Murat paralysait l’action de l’armée d’Italie aux ordres du prince Eugène, qui par là se trouvait placé entre deux feux.


État approximatif des forces que les coalisés menèrent contre la France en 1813-1814.

  • Grande armée alliée (Schwartzenberg). . . . . 190.000