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Page:Mullié - Biographie des célébrités militaires des armées de terre et de mer de 1789 à 1850, I.djvu/158

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vives et des plus acharnées. Blücher faillit être pris avec son état-major ; il échappa parce qu’il ne fut pas reconnu. Napoléon n’abandonna l’attaque qu’à dix heures du soir. La perte fut égale des deux côtés (3.000 tués ou blessés). Pendant la nuit l’ennemi se retira paisiblement sur Bar-sur-Aube, et le 30, Napoléon entre à Brienne. Là il apprend que Blücher et Schwartzenberg ont opéré leur jonction, et qu’ils l’attendent avec 100.000 hommes dans les plaines de l’Aube. Quoique plus faible de moitié, il accepte le combat. Un acharnement égal à celui de la veille anime les deux armées. Napoléon est au centre, au village de la Rothière. L’engagement (1er février) commence à une heure après midi et ne cesse qu’à minuit. Alors Napoléon ordonne la retraite sur Troyes et trompe ainsi Blücher qui espérait l’écraser le lendemain.

L’affaire de la Rothière eut de bien funestes résultats pour la cause de Napoléon : elle apprit aux alliés qu’on pouvait se mesurer avec lui au milieu de ses États. Elle affecta singulièrement le moral de l’armée française, et c’est de ce jour que commença la désertion pour aller toujours croissant. Les Français laissèrent à la Rothière 54 bouches à feu, environ 6.000 hommes dont 2.500 prisonniers. La bataille de la Rothière eut pour nous les conséquences d’une défaite.

Cependant un nouveau congrès s’ouvre à Châtillon (Côte-d’Or), le 5 février, entre les quatre grandes puissances alliées et la France. Il est composé du comte Stadion, baron Humbolt, comte Rasumwsky, pour l’Autriche, la Prusse et la Russie. L’Angleterre y est représentée par les lords Aberdeen, Callicart, le général Charles Stewart ; le ministre Castlereagh est présent. Le duc de Vicence, ministre des relations étrangères, y soutient les intérêts de la France. La malheureuse affaire de la Rothière est traitée sur les bases qu’on a posées à Francfort.

Le 5, Châlons-sur-Marne est occupé par les Prussiens de l’armée de Silésie, conformément au plan que les alliés ont arrêté depuis la bataille de la Rothière. Cette armée doit marcher sur Paris en côtoyant la Marne, tandis que la grande armée s’y rendra par l’une et l’autre rive de la Seine. Le 7, Troyes, évacuée par l’Empereur, est occupée par l’ennemi. C’est dans cette ville que se manifestent, mais en petit nombre, des symptômes de royalisme. L’Empereur, qui s’était mis à la poursuite de Blücher, arrive à Nogent. C’est là qu’il apprit la marche rapide de ce général sur la route de Châlons. Le maréchal Macdonald, chassé de la Belgique avait évacué cette dernière ville le 5, et il se retirait sur la Ferté-sous-Jouarre et sur Meaux. Pendant ces péripéties, Napoléon reçoit l’ultimatum des coalisés, par lequel il apprend que les bases de Francfort sont refusées, et que son Empire doit se borner dorénavant aux anciennes limites de la France. Le prince de Neufchâtel et le duc de Bassano, qui se trouvaient auprès de l’Empereur, lui conseillent de se soumettre à ces tristes conditions : Moi ! s’écria-t-il, je laisserais la France plus petite que je ne l’ai reçue ? Jamais… Vous redoutez la guerre ; je vois d’autres dangers… La France a besoin de la paix ; mais celle-ci est pire que la guerre la plus acharnée. Que serai-je pour les Français quand j’aurai signé leur humiliation ?… Je préfère courir les chances les plus rigoureuses de la guerre.

Le 10 février, un corps russe de 6.000 hommes, qui stationnait isolément vers Sézanne pour servir de communication aux deux armées alliées en marche sur Paris, est surpris par Napoléon ; 1.500 Russes à peine parviennent à s’échapper ; le reste est pris ou tué. Tels