Page:Mullié - Biographie des célébrités militaires des armées de terre et de mer de 1789 à 1850, II.djvu/584

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le 18, aux colonels de son corps d’armée, une circulaire ainsi conçue3 : « Monsieur le Colonel, la voix de noire auguste monarque a été entendue ; la majeure partie des peuples du royaume s’arment pour défendre la patrie, le trône et les lois. Je suis l’heureux témoin de l’enthousiasme des habitants et des troupes de la capitale en faveur de cette cause sacrée. Tout me donne la douce espérance que bientôt la France sera pour jamais délivrée de son ennemi, et qu’elle jouira, sous la protection de la charte constitutionnelle et de son souverain légitime, du bonheur qu’elle mérite et de la considération que les autres nations ne peuvent lui refuser. Cependant des émissaires, soudoyés par Bonaparte, parcourent les campagnes pour en séduire les crédules habitants et pour nous jeter encore dans toutes les calamités d’une révolution pire que celle qui a coûté tant de sang à notre chère patrie. La perfidie de leurs suggestions doit s’étendre jusque sur les troupes ; ils vont tenter d’égarer les soldats ; que ceux-ci se défient de leurs odieuses manœuvres et se préservent de l’horreur d’y prendre part. Rappelez-leur qu’ils ne sont point les soldats d’un parti, mais bien ceux de la France menacée qu’ils doivent défendre. Leurs familles attendent d’eux toute leur sécurité ; la France entière compte sur leur fidélité ; elle réclame leurs services, ils ne seront pas sourds à cette voix imposante. Recueillez donc MM. les officiers et les sous-officiers de votre régiment, faites-leur connaître la position affreuse où Bonaparte veut encore nous réduire pour satisfaire ses passions violentes aux dépens de la fortune, de la tranquillité et du sang des Français. Dites-leur surtout une grande vérité, c’est que si les troupes chargées de défendre leur pays s’écartaient de leur devoir, et si, oubliant ce qu’elles doivent à la patrie et à leur roi, elles commettaient la lâcheté de se livrer aux rebelles, elles verraient sous peu les troupes étrangères sur notre territoire, toutes les horreurs d’une guerre dont elles seraient la cause et la perte honteuse et irréparable de l’honneur national. La guerre qui nous est suscitée, monsieur le colonel, est celle de la trahison contre la fidélité, de l’iniquité contre la justice, de la honte contre l’honneur. Les troupes françaises ont le choix de l’une ou de l’autre cause ; mais je ne leur ferai point l’injure de leur indiquer celle qu’elles doivent embrasser. — Paris, le 18 mars 1815. Signé, le maréchal duc DE BELLUNE. »

Parti de Paris le 19, le maréchal arriva le 20 à Châlons, où il trouva toutes les troupes de son commandement réunies. Les bruits de l’arrivée de l’Empereur à Paris l’engagèrent à porter une partie de son corps d’armée sur la rive droite de la Marne, dans les diverses directions de Paris. Mais les troupes, informées de la marche triomphale de l’Empereur, prirent successivement les couleurs nationales et manifestèrent hautement leur peu de sympathie pour le gouvernement des Bourbons. Le duc de Bellune, voyant son autorité méconnue et craignant d’être arrêté, prit la fuite et alla rejoindre le roi. Il rentra au mois de juillet et fut nommé Pair le 17 août, puis major général de la Garde royale, et le 12 octobre, président de la commission chargée d’examiner la conduite des officiers de tous grades qui avaient servi pendant l’usurpation.

Le 10 janvier 1816 le duc de Bellune fut pourvu du gouvernement de la 16e division militaire, fut commandeur de l’ordre do Saint-Louis, et grand-croix après le mariage du duc de Berri, dont il signa le contrat, puis enfin chevalier commandeur de l’ordre du Saint-Esprit.