Page:Mullié - Biographie des célébrités militaires des armées de terre et de mer de 1789 à 1850, II.djvu/597

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avec fureur et le résultat d’une nouvelle attaque fut la prise de la Haie-Sainte. — Le mouvement de la cavalerie anglaise nécessita l’ébranlement de la cavalerie française, et causa le malheureux entraînement qui mit en action, dans un moment inopportun, la plus grande partie des réserves françaises. Le maréchal Ney devait se borner à refouler le corps anglais qui avait menacé l’infanterie du centre ; au lieu de cela, il enleva les cuirassiers du général Milhaud et la cavalerie de la Garde, et les lança jusque sur les batteries anglaises sans avoir calculé la portée de ce mouvement. — Cette charge ne fut ni heureusement ni habilement exécutée. Les masses de cavalerie ne s’avancèrent pas avec cet ensemble, cet ordre imposant qui inspirent la confiance et promettent le succès. Au lieu de réserver le grand effort pour le moment de l’abordage, on lança la cavalerie du général Milhaud d’abord, puis celle de la Garde impériale, et enfin la droite du corps de réserve du général Kellermann, et tout arriva en désordre, pêle-mêle et hors d’haleine sur le rideau qu’occupait la ligne d’artillerie anglaise. Les pièces furent abandonnées, mais les chevaux purent être emmenés. C’est là, il faut le dire, le seul succès de la journée, ce qu’on a probablement appelé la bataille gagnée. L’Empereur, lui, ne s’y trompa point, quand il vit les cuirassiers de Milhaud et la cavalerie légère de la Garde couronner la crête du plateau, il dit avec vivacité au maréchal Soult : Voilà un mouvement qui pourra avoir des résultats funestes pour cette journée. Soult s’emporta contre Ney et répondit : Il nous compromet comme il a failli nous compromettre à Iéna.

Ce prétendu succès eut, il est vrai, un grand retentissement dans les positions éloignées de l’ennemi, où des mouvements de retraite furent commencés. Mais en arrière de l’artillerie se trouvait une double ligne d’infanterie formée en carré. La cavalerie française dut se reformer tant bien que mal et rester longtemps dans cette cruelle position de ne pouvoir se retirer dans la crainte d’entraîner l’armée, ni changer de mouvement parce qu’elle n’avait pas de carrière, sans infanterie, sans artillerie pour s’appuyer, en présence des carrés ennemis qui réservaient leur feu, et d’une nuée de tirailleurs dont chaque coup portait, recevant ainsi la mort sans pouvoir la donner. Une charge de toute la cavalerie à une aussi grande distance de l’infanterie, était une haute imprudence. Un pareil mouvement devait réussir ou tout compromettre ; il ne réussit pas ; dès lors, plus d’espoir de vaincre. Le mauvais destin de la France semblait présider à toutes les fausses mesures de la journée. Une brigade de carabiniers, forte de 1.000 chevaux, avait été préservée de l’entraînement fatal : placée près d’une batterie de la Garde, le général de brigade qui la commandait avait reçu du général Kellermann, son chef immédiat, la défense la plus formelle de faire aucun mouvement sans un ordre exprès. Cette brigade était donc dans la plaine ; le maréchal Ney l’aperçoit, court à elle, s’indigne de son inaction et lui ordonne de se précipiter sur les 7 ou 8.000 Anglais, placés en échelons sur la pente de la colline, près du bois de Hougoumont, et flanqués de nombreuses batteries d’artillerie. Les carabiniers furent forcés d’obéir : soit impuissance, soit maladresse, leur charge n’eut aucun succès ; la moitié de la brigade fut en un instant couchée par terre. Quand on verra plus tard que le sort de la bataille fut, en définitive, fixé par une charge de la division des gardes anglaises, auxquelles l’Empereur n’eut plus à opposer que les escadrons de service auprès de sa personne, on comprendra