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Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/190

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voyageur ferme son livre, s’arrête, regarde et s’écrie : Hé ! Hé !… Je ne veux plus jamais voir de cascades, du moins, je ne ferai pas un détour pour en voir une. Ces choses là ne me disent rien. Les monuments me parlent un peu plus haut, surtout quand ils me rappellent une page d’histoire quelconque. Ce sentiment là est de tout autre nature. On ressuscite le passé. On passe la revue des ombres. Parmi les ombres, il en est de hideuses. Aussi, un intérêt poignant s’y mêle-t-il quelquefois. Le sentiment du beau n’y trouve pas toujours satisfaction… mais, au moins, il n’y a pas de mélange. Même, sans invoquer l’histoire, le beau se rencontre dans quelques autres monuments ; seulement, ce beau là m’est gaté par des guides en papier, ou en chair et en os, ce qui revient au même. Ces guides détruisent tout prestige avec leur monotone description ou boniment, exemple : la chapelle que voici fut érigée par l’Évêque de Munster, en 1423… les piliers en ont 63 pieds de hauteur et reposent sur… sur je ne sais quoi, et cela m’est parfaitement égal. Ce bavardage est assommant. On sent qu’il faut avoir alors pour 63 pieds d’admiration, dans sa poche, sinon il faut se résoudre à passer pour un Vandale, ou pour un commis-voyageur. Mieux vaut garder son guide dans son étui, si c’est un guide imprimé, et le laisser à la porte, ou se taire, en cas contraire. Par malheur, on a souvent besoin de renseignements pour porter un jugement plus ou moins juste. Puis, il est difficile, en admettant qu’on puisse se passer de ces renseignements, il est difficile de trouver dans une construction, ancienne ou moderne, quelque chose de durable, quelque chose qui satisfasse notre penchant inné pour le beau, ces constructions ne se mouvant pas. Cette remarque