bienveillance : « Jamais ! non, jamais ! aucun fonctionnaire n’a parlé comme lui !… »
Oui, Havelaar voulait conserver, rétablir ; il ne voulait rien détruire. Il avait compassion du Prince-Régent. Lui, qui savait jusqu’à quel degré d’abaissement et de honte, la gêne peut conduire un homme de cœur, il cherchait des motifs pour l’excuser.
Le Prince-Régent était âgé ; il se trouvait aussi être le chef d’une famille, vivant grandement, dans les provinces voisines, où le café était récolté en quantité, et où l’on jouissait d’émoluments considérables.
N’était-il pas douloureux pour lui de céder le pas, dans sa manière de vivre, à des parents tous plus jeunes que lui !
Outre cela, c’était un fanatique, qui en avançant en âge, croyait fermement acheter le salut de son âme, par des pèlerinages, coûteux et payés, à La Mecque, et par des aumônes faites à des fainéants qui marmottaient des prières pour lui.
Les fonctionnaires qui avaient précédé Havelaar, à Lebac, n’avaient pas toujours donné le bon exemple ; et la nombreuse famille du Prince-Régent qui vivait, à Lebac même, entièrement à ses crochets, le mettait dans l’impossibilité matérielle de rentrer dans la bonne voie.
Havelaar s’ingéniait à trouver des motifs de ne pas employer les moyens rigoureux ; en tout et pour tout, il n’employait que la plus extrême douceur.
C’était plus que la douceur !
Avec une générosité, rappelant les fautes qui l’avaient rendu si pauvre, il avançait souvent de l’argent au Prince-Régent, pour que le besoin ne le poussât pas trop vite à une extrémité fâcheuse ; comme toujours, il s’oubliait lui-même, à tel point