Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/406

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Le mystère gardé à ce sujet avait un double but.

Premièrement, espérant réussir, et faire rentrer le Prince-Régent dans le droit chemin, je désirais ne pas le compromettre.

Le secrétaire est venu en personne m’apporter, au nom du Prince-Régent, ses remerciements pour ma discrétion.

Cela, à la date du 12 courant.

Mais, plus tard, commençant à désespérer du résultat de mes efforts, ou plutôt sentant déborder la coupe de mon indignation, à propos d’un fait récent que je venais d’apprendre, je m’aperçus qu’un plus long silence me rendrait complice du Prince-Régent, que j’aurais l’air de me taire dans mon propre intérêt, et je réfléchis que j’avais des devoirs à remplir envers moi, et envers les miens.

Certes, après ma dépêche d’hier, je serais indigne de servir le Gouvernement, si le contenu en était déclaré sans base sérieuse, et de pure invention.

Puis, me sera-t-il possible de prouver que j’ai agi comme doit le faire un bon sous-préfet, que je ne suis pas au-dessous des fonctions qu’on m’a confiées ; que je ne mets pas légèrement en jeu dix-sept années de loyaux, et pénibles services, et plus encore l’intérêt de ma femme et de mon enfant, me sera-t-il possible de prouver tout cela, si, grâce à ce secret profond, le coupable se voit à même de se couvrir, comme on dit ici.

Au moindre soupçon, le Prince-Régent expédiera un messager à son neveu, qui est en route, et qui a tout intérêt à ce que son oncle soit maintenu dans ses fonctions. Il empruntera de l’argent, n’importe à quel taux, et le distribuera d’une main prodigue à tous les malheureux qui auront été lésés par lui, dans les derniers temps.