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LE DYCH TAU

que nous avons encore à traverser la muraille sur notre gauche. Nous grimpons le long de la grande falaise, collés à des pentes se déversant sur le vide ou à des corniches peu rassurantes, jusqu’à ce que nous ayons atteint un endroit où il nous faut faire de violents efforts pour nous permettre tout juste de nous élever sur une sorte de surplomb. Au dessus, l’angle de pente est moins rapide et quelques fissures ou quelques éclats de rochers nous assurent de bonnes prises. Un peu plus loin pourtant un second et, s’il est possible, plus mauvais surplomb nous apparaît. Après qu’il m’eût été donné de contempler les gracieuses attitudes de Zurfluh et de l’entendre tout haletant, alors qu’il se trouvait aux prises avec quelque difficulté désespérée, il commença à devenir évident pour moi que le second pic du Caucase ne devait pas être escaladé sans être attaché à la corde. N’était-ce pas, du reste, chose contraire à toutes les règles édictées pour servir de guide à la jeunesse et à l’innocence par les encyclopédies de Badminton et de Ail England[1] ? Cela ne serait-il même pas regardé comme une insulte pour notre pic ? Comme je suggérais délicatement ces craintes à Zurfluh, il me demanda si je voulais venir jusqu’à la corde ou si je voulais que la corde vienne à moi. Pour quelque raison cachée, un large rire illumina sa face alors qu’il me recommandait fortement la première manière de faire, tout en me faisant remarquer que la corniche sur laquelle j’étais juché n’était pas une place commode pour s encorder. En dépit de ses avis je me décide sans la moindre hésitation pour la seconde alternative, et quand la corde est descendue c’est avec succès que je résous les difficultés de la mettre. Et maintenant, il faut que je rende compte d’un étrange phénomène : un moment plus tôt

  1. Voir la note p. 198. — M. P.