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QUELQUES COLS CAUCASIENS

évidemment accès à la pente de rocher qui se trouve à notre droite. Zurfluh nous affirme qu’il a senti dans le sérac un mouvement précurseur et que le plus léger choc, tel que la taille des marches, enverrait inévitablement toute la construction en une avalanche de tonnerre dans les profondeurs garnies de brouillards. Zurfluh et le Tartare reviennent donc sur le terrain solide, pendant que, attaché à l’un des bouts de la corde, j’entreprends d’escalader, à l’aide de quelques marches, un sérac plus petit et mieux ancré sur la pente. Les guides suivent et nous descendons les rochers jusqu’au glacier, pressés vivement par l’idée que le sérac pourrait bien se mettre dans la tête de nous rouler dessus.

Le brouillard, qui s’était éclairci, commençait maintenant à se déchirer par masses détachées, et l’on pouvait voir de temps à autre les arêtes et les profondes vallées de la Suanétie. À mesure que nous avancions, les grandes murailles du glacier commençaient à se refermer sur nous, laissant juste une étroite gorge, à travers laquelle la chute de glace plongeait jusqu’au monde des gazons, des fleurs et des forêts.

Grâce à la description de ce col, due à M. Freshfield, nous savons maintenant où nous sommes ; mis en gaîté par le temps qui s’améliore rapidement, nous traversons sur les rochers situés à gauche de la chute de séracs, et nous tournons ainsi l’obstacle. Après avoir atteint le glacier inférieur, nous marchons pleins d’entrain, et, à environ 4 h. 30 soir, nous sortons de la glace pour trouver la végétation luxuriante des pentes méridionales. Notre Tartare, qui n’avait plus les difficultés de la montagne pour occuper son esprit, nous donna son opinion sur la race Suanétienne. Il avait dans la voix un véritable acharnement quand il nous décrivait la joie