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PLAISIRS ET PÉNALITÉS

rais encore dans les névés supérieurs, leurré par les vapeurs silencieuses ou par les rayons rutilants d’un soleil sur son déclin, même si des infirmités physiques ou autres, même si, après les temps révolus, des ailes ou autres apanages angéliques étaient venus emporter dans un passé lointain toute pensée d’escalade rochassière.

Il a été souvent affirmé, même parmi les doctes, que, puisque l’alpinisme comportait un danger quelconque, personne ne devrait jamais s’y livrer, et, à plus forte raison d’aussi précieuses individualités que celles du Club Alpin Anglais. Avant d’examiner cette très pernicieuse doctrine, il est bon de se souvenir que, bien que les périls de l’alpinisme n’aient pas été complètement dissipés dans l’espace par les éclairs et les foudres des encyclopédies de Badminton et de All England, encore s’en faut-il pourtant que ces périls soient très grands. Les pages précédentes contiennent, à une seule exception près[1], le récit de toutes les difficultés que j’ai éprouvées dans la montagne, récit qui a pu faire naître l’idée possible d’un désastre : hé bien ! comme ma dévotion à notre sport commence en 1871, et qu’elle s’est continuée depuis avec une ardeur sans repos, il devient évident — autant qu’un modeste individu peut se poser comme le type d’une catégorie — que les périls qui menacent le grimpeur sont extrêmement peu nombreux et sont très rarement rencontrés. Pourtant tels qu’ils se sont présentés à moi je ne voudrais pour rien au monde les avoir manqués. Il y a dans le danger une puissance éducative et purifiante que l’on ne trouve à aucune école ; c’est en effet une excellente chose pour un homme que de savoir qu’il ne marche pas à la gourmandise et à l’efféminement. On

  1. Voyez la note de la page 8. — M. P.