Aller au contenu

Page:Mummery - Mes escalades dans les Alpes.djvu/399

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
309
DE L’ALPINISME

laquelle il est sûr qu’elle sera plus ou moins prise. Il est certain que, dans des circonstances qui comporteraient pour un seul membre de la caravane une douzaine de chances d’échapper, il sera très improbable que tous aient une chance simultanée, et dès lors la corde devient une véritable cause de mort. Dans de fortes avalanches, là où tout ce que peut faire le grimpeur est de garder la tête hors de la crête de la vague, celui qui est encordé est enchevêtré avec ses camarades, comme le serait un nageur au milieu d’un furieux ressac. On n’a qu’à lire le récit de la mort de Bennen pour se rendre compte combien la corde peut être désastreuse[1].

Je n’ai pas ici le moindre désir de m’élever contre l’usage de la corde, mais seulement de faire remarquer certains faits bien connus qui ont été perdus de vue dans des articles récents de la littérature alpine. En thèse générale elle est de la plus grande valeur, et, lorsqu’il y a des grimpeurs d’habileté et d’expérience différentes, son usage constant est réclamé par les sentiments primordiaux de camaraderie et de solidarité. Mais il y a quelque danger à la regarder comme une sorte de Providence, toujours prête à sauver l’insouciant ou l’inhabile, n’importe s’il a peu d’expérience, n’importe s’il n’est pas fait pour l’expédition qu’il a entreprise. Si j’ai déjà longuement disserté sur les désavantages occasionnels que la corde comporte, et si j’ai dit peu de choses sur la sécurité constante qu’elle assure, c’est seulement parce qu’il n’y a, me semble-t-il, aucun danger de méconnaître cette dernière assertion et qu’il y en a beaucoup à totalement oublier la première. Il faut d’ailleurs se

  1. [John Tyndall]. Hours of Exercise in the Alps, [London 1811], p. 204-205 — A. F. M.
    Quatre éditions ont paru depuis, la dernièreen 1894 — M. P.