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SUR HENRY MURGER.

jaser sur tes lèvres ! Cette valse non plus, cette valse à deux temps qui me fit tant de mal ! Encore moins ce lied que des Allemands chantaient dans le bois de Meudon et que nous avons répété ensemble ! Pas de musique, mais causons sans haine ni colère de nos anciennes amours. » Et Murger évoque les soirées d’hiver passées dans la petite chambre près du foyer où la bouilloire fredonnait son refrain régulier : les longues promenades, au printemps, à travers les prés et les bois, et les innocents plaisirs goûtés au sein de la nature complice. Il refait cet éternel poème de la jeunesse que six mille ans n’ont pas vieilli. Puis vient la déception. Un jour, le poëte se trouve seul. La belle amoureuse est partie. Adieu la bottine grise, la robe de toile et le chapeau de paille parfumé d’une fleur naturelle ! La moire antique ballonne autour de cette taille souple, le cachemire fait son pli sur cette nuque aux blonds cheveux follets : un bracelet de prix scintille à ce bras potelé : des bagues chargent ces mains jadis plus brunes et blanchies maintenant par l’oisiveté. — Il fallait bien s’y attendre : l’histoire est fade et commune. Le poëte lui-même en rit comme un fou !

La seconde, qui est la Chanson de Musette, nous semble un pur chef-d’œuvre de grâce, de tendresse et d’originalité…

Deux pièces d’un pressentiment funèbre, trop justifie, hélas ! terminent le recueil. L’une est un appel presque caressant à la mort ; l’autre, une espèce de testament, moitié sérieux, moitié ironique, où l’auteur, doutant qu’il puisse s’asseoir « parmi le groupe élu des gens qui ver-