Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Œuvres posthumes.djvu/152

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le Roi.

Laissons les vains discours ; avant tout elle est reine.
Sais-tu quels châtiments ton insolence entraîne ?
Avec quelle rigueur ce crime est expié ?

Frédégonde.

Je le savais naguère, et n’ai rien oublié.

Le Roi.

Et tu ne trembles pas ?

Frédégonde.

Et tu ne trembles pas ?La peur m’est inconnue.

Le Roi.

Tu méprises la mort ?

Frédégonde.

Tu méprises la mort ?Non, seigneur, je l’ai vue.
J’ai calculé ses coups et j’ai compté ses pas.
Je sais ce qu’elle vaut, et je ne la crains pas.

Le Roi.

Ainsi, malgré moi-même, aveugle en sa faiblesse,
Alors qu’il doit fléchir, ton orgueil se redresse.
Misérable fierté dont croit s’enfler ton cœur !
On peut braver la mort, mais non pas la douleur !
À défaut de respect, faut-il qu’on t’avertisse
De te sauver, du moins, des horreurs du supplice ?
Faut-il te rappeler dans quel affreux tourment
La victime muette expire lentement ?
Ne te souvient-il plus des caveaux de Clothaire ?

Frédégonde.

Il me souvient, seigneur, qu’il était votre père.