Pourquoi me laissent-ils ? Il faut que j’aille avec eux. Où veulent-ils que j’aille ?
- Il fait quelques pas vers la maison.
Ah ! cette maison déserte ! Non, par le ciel, je n’y retournerai pas ce soir ! Si ces deux chambres-là doivent être vides cette nuit, la mienne le sera aussi. Il ne s’est pas défendu. Je n’ai pas senti son épée. Il a reçu le coup, cela est clair. Il va mourir chez Manfredi.
C’est singulier. Je me suis pourtant déjà battu. Lucrèce partie, seule, par cette horrible nuit ! Est-ce que je n’entends pas marcher là dedans ?
- Il va du côté des arbres.
Non, personne. Il va mourir. [Lucrèce seule, avec une femme !] Eh bien ! quoi ? je suis trompé par cette femme. Je me bats avec son amant. Je le blesse. Me voilà vengé. Tout est dit. Qu’ai-je à faire à présent ?
Ah ! cette maison déserte ! cela est affreux. Quand je pense à ce qu’elle était hier au soir ! à ce que j’avais, à ce que j’ai perdu ! Qu’est-ce donc pour moi que la vengeance ? Quoi ! voilà tout ? Et rester seul ainsi ? À qui cela rend-il la vie, de faire mourir un meurtrier ? Quoi ? répondez ? Qu’avais-je affaire de chasser ma femme, d’égorger cet homme ? Il n’y a point d’offensé, il n’y a qu’un malheureux. Je me soucie bien de vos lois d’honneur ! Cela me console bien que vous ayez inventé cela pour ceux qui se trouvent dans ma position ; que vous l’ayez réglé comme une cérémonie ! Où sont mes vingt années