Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies I.djvu/128

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avoir du courage, et je n’en ai point. Maintenant, vous le voyez, je ne puis partir. Laissez-moi parler à cet homme.

Mathurin, s’approchant d’André.

Plaît-il, maître ?

André.

Aussi bien ne suis-je pas déshonoré ? Qu’ai-je à faire en ce monde ? Ô lumière du soleil ! ô belle nature ! Ils s’aiment, ils sont heureux. Comme ils courent joyeux dans la plaine ! Leurs chevaux s’animent, et le vent qui passe emporte leurs baisers. La patrie ? la patrie ? ils n’en ont point ceux qui partent ensemble.

Damien.

Sa main est froide comme le marbre.

André, bas à Mathurin.

Écoute-moi, Mathurin, écoute-moi, et rappelle-toi mes paroles : tu vas prendre un cheval ; tu vas aller chez Monna Flora t’informer au juste de la route. Tu lanceras ton cheval au galop. Retiens ce que je te dis. Ne me le fais pas répéter deux fois, je ne le pourrais pas. Tu les rejoindras dans la plaine ; tu les aborderas, Mathurin, et tu leur diras : Pourquoi fuyez-vous si vite ? La veuve d’André del Sarto peut épouser Cordiani.

Mathurin.

Faut-il dire cela, monseigneur ?

André.

Va, va, ne me fais pas répéter.

Mathurin sort.