Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies I.djvu/314

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Perdican.

Il y a de la franchise dans ta démarche ; touche là et soyons bons amis.

Camille.

Je n’aime pas les attouchements.

Perdican, lui prenant la main.

Donne-moi ta main, Camille, je t’en prie. Que crains-tu de moi ? Tu ne veux pas qu’on nous marie ? eh bien ! ne nous marions pas ; est-ce une raison pour nous haïr ? ne sommes-nous pas le frère et la sœur ? Lorsque ta mère a ordonné ce mariage dans son testament, elle a voulu que notre amitié fût éternelle, voilà tout ce qu’elle a voulu. Pourquoi nous marier ? voilà ta main et voilà la mienne, et pour qu’elles restent unies ainsi jusqu’au dernier soupir, [crois-tu qu’il nous faille un prêtre ?] Nous n’avons besoin que de Dieu.

Camille.

Je suis bien aise que mon refus vous soit indifférent.

Perdican.

Il ne m’est point indifférent, Camille. Ton amour m’eût donné la vie, mais ton amitié m’en consolera. Ne quitte pas le château demain ; [hier,] tu as refusé de faire un tour de jardin, parce que tu voyais en moi un mari dont tu ne voulais pas. Reste ici quelques jours, laisse-moi espérer que notre vie passée n’est pas morte à jamais dans ton cœur.

Camille.

Je suis obligée de partir.