Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies III.djvu/111

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Poser quelques bijoux sur cette épaule ronde,
Sur ce cœur qui palpite un céladon changeant,
Serrer ce petit pied dans un réseau d’argent,
Entourer la beauté, dans sa fleur et sa grâce,
Des prestiges de l’art qu’elle égale et surpasse,
Ce serait donc, ma chère, un grand crime à tes yeux ?
Payer ! efface donc ; ce mot est odieux.
Oublions ce billet, n’y songeons plus, Lisette.
On paie un intendant, un rustre, une grisette ;
Mais, dans ce monde-ci, je ne sais pas encor
Qu’on se soit avisé de payer un trésor,
Et ton cœur est sans prix, quand tu serais moins belle.

Lisette.

Mais, monseigneur, pourtant…

Le duc.

Mais, monseigneur, pourtant…Fi ! tu fais la cruelle,
On ouvre la porte du fond.
Deux mots : — on va souper ; les gens ouvrent déjà.
Écoute : — nous allons au bal de l’Opéra ;
Mais je reviendrai seul, et grâce à la cohue,
À peine entré, je sors et regagne la rue.
Tu seras seule aussi, mes laquais ne voient rien ;
Accorde-moi, de grâce, un moment d’entretien,
Un seul instant, pour moi, Lisette, et pour toi-même.
Ce n’est pas un amant, c’est un ami qui t’aime,
Songes-y.

Lisette.

Songes-y.Mais vraiment…