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Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies III.djvu/304

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Bettine.

Steinberg ! Que le monde prononce ton nom quand il voudra parler d’un ingrat !

Le marquis.

Il est certain que tout cela n’est pas beau. En vérité, cela demanderait vengeance.

Bettine.

Vengeance ! ah ! oui, n’en doutez pas ! Mais quelle vengeance puis-je trouver ? Vous parlez en homme, Stéfani, et vous ressentez en homme un affront. Vous-même, cependant, que pouvez-vous faire quand vous avez un ennemi ? Que pouvez-vous de plus que de le tuer ? Vous croyez vous venger ainsi… Ah ! mon ami, pour un cœur honnête, il y a des maux plus affreux que la mort ; mais pour un lâche, ce qu’il y a de plus terrible, c’est la mort, qui n’est rien.

Le marquis.

Je gagerais que cette lettre impertinente n’est pas entièrement du fait de votre baron. Il y a de la femme là dedans, — c’est un monstre à deux têtes, — car enfin quelle nécessité de vous avertir qu’il ne s’en va pas seul ? La lâcheté est de lui, l’insulte est féminine.

Bettine.

Je l’ai senti comme vous. Il le sait bien aussi, et il a voulu mettre entre nous une barrière infranchissable. Il craignait que je ne voulusse le suivre, il avait peur de mon pardon, et il a pris ce moyen de l’éviter ; il