Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Confession d’un enfant du siècle.djvu/26

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En lisant l’histoire de la chute de l’empire romain, il est impossible de ne pas s’apercevoir du mal que les chrétiens, si admirables dans le désert, firent à l’État dès qu’ils eurent la puissance. « Quand je pense, dit Montesquieu, à l’ignorance profonde dans laquelle le clergé grec plongea les laïques, je ne puis m’empêcher de le comparer à ces Scythes dont parle Hérodote, qui crevaient les yeux à leurs esclaves, afin que rien ne pût les distraire et les empêcher de battre leur lait. — Aucune affaire d’État, aucune paix, aucune guerre, aucune trêve, aucune négociation, aucun mariage ne se traitèrent que par le ministère des moines. On ne saurait croire quel mal il en résulta. »

Montesquieu aurait pu ajouter : Le christianisme perdit les empereurs, mais il sauva les peuples. Il ouvrit aux Barbares les palais de Constantinople, mais il ouvrit les portes des chaumières aux anges consolateurs du Christ. Il s’agissait bien des grands de la terre, et voilà qui est intéressant que les derniers râlements d’un empire corrompu jusqu’à la moelle des os, que le sombre galvanisme au moyen duquel s’agitait encore le squelette de la tyrannie sur la tombe d’Héliogabale et de Caracalla ! La belle chose à conserver que la momie de Rome embaumée des parfums de Néron, cerclée du linceul de Tibère ! Il s’agissait, messieurs les politiques, d’aller trouver les pauvres et de leur dire d’être en paix ; il s’agissait de laisser les vers et les taupes ronger les monuments de honte, mais de tirer des flancs de la