ta robe, tu ne crois pas, comme les vierges, que tout le monde te ressemble, et tu sais le prix de ta pudeur. Comment la femme qui a été vantée peut-elle se résoudre à ne l’être plus ? se croit-elle vivante si elle reste à l’ombre, et s’il y a silence autour de sa beauté ? Sa beauté même, c’est l’éloge et le regard de son amant. Non, non, il n’en faut pas douter ; qui a aimé ne vit plus sans amour ; qui apprend une mort se rattache à la vie. Brigitte m’aime et en mourrait peut-être ; je me tuerai, et un autre l’aura.
Un autre ! un autre ! répétais-je en m’inclinant, appuyé sur le lit, et mon front effleurait son épaule. N’est-elle pas veuve ? pensai-je ; n’a-t-elle pas déjà vu la mort ? ces petites mains délicates n’ont-elles pas soigné et enseveli ? Ses larmes savent combien elles durent, et les secondes durent moins. Ah, Dieu me préserve ! pendant qu’elle dort, à quoi tient-il que je ne la tue ? Si je l’éveillais maintenant et si je lui disais que son heure est venue et que nous allons mourir dans un dernier baiser, elle accepterait. Que m’importe ? Est-il donc sûr que tout ne finisse pas là ?
J’avais trouvé un couteau sur la table, et je le tenais dans ma main.
Peur, lâcheté, superstition ! qu’en savent-ils, ceux qui le disent ? C’est pour le peuple et les ignorants qu’on nous parle d’une autre vie ; mais qui y croit au fond du cœur ? Quel gardien de nos cimetières a vu un mort quitter son tombeau et aller frapper chez le prêtre ?