Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Nouvelles et Contes I.djvu/151

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ouvrit, et vit madame de Parnes debout sur le palier, les bras croisés, enveloppée dans sa mantille et appuyée contre le mur ; elle était d’une pâleur effrayante, et prête à se trouver mal. Il la prit dans ses bras, la porta sur la causeuse, et s’efforça de l’apaiser. Il lui demanda pardon de sa mauvaise humeur, la supplia d’oublier cette scène fâcheuse, et s’accusa d’un de ces accès d’impatience dont il est impossible de dire la raison.

— Je ne sais ce que j’avais ce matin, lui dit-il ; une fâcheuse nouvelle que j’ai reçue m’avait irrité ; je vous ai cherché querelle sans motif ; ne pensez jamais à ce que je vous ai dit que comme à un moment de folie de ma part.

— N’en parlons plus, dit la marquise revenue à elle, et allez me chercher mon coussin. Valentin obéit avec répugnance ; madame de Parnes jeta le coussin à terre, et posa ses pieds dessus. Ce geste, comme vous pensez, ne fut pas agréable au jeune homme ; il fronça le sourcil malgré lui, et se dit qu’après tout il venait de céder par faiblesse à une comédie de femme.

Je ne sais s’il avait raison, et je ne sais non plus par quelle obstination puérile la marquise avait voulu, à toute force, obtenir ce petit triomphe. Il n’est pas sans exemple qu’une femme, et même une femme d’esprit, ne veuille pas se soumettre en pareil cas ; mais il peut arriver que ce soit de sa part un mauvais calcul, et que l’homme, après avoir obéi, se repente de