gnée par les délicats. Après dîner, ils allèrent au spectacle. À onze heures, Frédéric demanda à Bernerette où il fallait la reconduire ; elle garda quelque temps le silence, à demi honteuse et à demi craintive ; puis, entourant de ses bras le cou du jeune homme, elle lui dit timidement à l’oreille :
— Chez toi.
Il témoigna quelque étonnement de la trouver libre.
— Eh ! quand je ne le serais pas, répondit-elle, ne crois-tu pas que je t’aime ? Mais je le suis, ajouta-t-elle aussitôt, voyant Frédéric hésiter ; la personne qui m’accompagnait tantôt t’a peut-être donné à penser ; l’as-tu regardée ?
— Non, je n’ai regardé que toi.
— C’est un excellent garçon ; il est marchand de nouveautés et assez riche ; il veut m’épouser.
— T’épouser, dis-tu ! Est-ce sérieux ?
— Très sérieux ; je ne l’ai pas trompé, il sait l’histoire entière de ma vie ; mais il est amoureux de moi. Il connaît ma mère, et il a fait sa demande il y a un mois. Ma mère ne voulait rien dire sur mon compte ; elle a pensé me battre quand elle a appris que je lui avais tout déclaré. Il veut que je tienne son comptoir : ce serait une assez jolie place, car il gagne par an une quinzaine de mille francs ; malheureusement cela ne se peut pas.
— Pourquoi ? Y a-t-il quelque obstacle ?
— Je te dirai cela ; commençons par aller chez toi.