Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Nouvelles et Contes II.djvu/237

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

étaient entassés, pêle-mêle, tous les joyaux de sa couronne : un diadème en clinquant pour la Tour de Nesle, des colliers en strass, des émeraudes en verre qui avaient besoin des quinquets pour briller d’un éclat douteux ; du milieu de ce trésor, elle tira le bracelet de Tristan et considéra attentivement les deux noms gravés sur la plaque.

— Il est joli, ce serpentin, dit-elle ; quelle peut être l’idée de Berville en voulant le reprendre ? je crois qu’il me sacrifie. Si l’inconnue me connaît, je suis compromise. Ces deux noms à côté l’un de l’autre, ce n’est pas autorisé. Si Berville n’a eu pour moi qu’un caprice, est-ce une raison ? Bah ! il m’en donnera un autre ; ce sera drôle.

Javotte allait peut-être envoyer le bracelet, lorsqu’un coup de sonnette vint l’interrompre dans ses réflexions. C’était le monsieur aux lunettes d’or.

— Mademoiselle, dit-il, je vous annonce un succès : vous êtes des chœurs. Ce n’est pas, de prime abord, une affaire extrêmement brillante ; trente sous, vous savez, mais qu’importe ? ce joli pied est dans l’étrier. Dès ce soir, vous porterez un domino dans le bal masqué de Gustave.

— Voilà une nouvelle ! s’écria Javotte en sautant de joie. Choriste à l’Opéra ! choriste tout de suite ! j’ai justement repassé mon chant ; je suis en voix ; ce soir, Gustave !… Ah, mon Dieu !

Après le premier moment d’ivresse, madame Ro-